27 avril 2010

48 heures au village de Sako

Après 7 heures de route de terre poussiereuse dans un autobus d'école jaune rempli à craquer, une crevaison, des arrêts fréquents dans les villages pour acheter mangues, oignons, brochettes de boeuf, etc. et une panne d'essence en brousse avec la voiture d'Eve et Simon, j'ai finalement rejoint le petit village de Sako pour les funérailles de la mère de Mabourou. Rappellez-vous que j'hésitais à y aller mais Eve m'a convaicue en me disant que les funérailles sont les plus belles cérémonies du Burkina et qu'avec de l'eau et du papier de toilette, ça devrait aller.

Après une petite sieste à l'ombre d'un arbre de karité, nous avons visité les familles du village et débuté la tournée de salutations. On s'est vite senti envahi. Tout le monde nous suivait, nous observait, voulait nous saluer. On leur faisait tout un honneur d'être parmi eux pour la cérémonie. Mabourou voulait qu'on prenne des photos de lui avec son père, sa grand-mère, le chef du village, etc. Et ensuite, tout les villageois voulaient des photos d'eux aussi. C'est rare qu'ils ont la chance de rencontrer du monde avec des appareils photos. J'adore prendre des photos mais y'a quand même des limites! Je peux tout de même pas imprimer des photos individuelles de tout le monde du village! Le soir venu, il y avait une fête où ils ont tué une chèvre, un chien (!!!) et un zébu. On a mangé du spaguetti à la main et bu du dolo (bière artisanale à base de sorgho, une sorte de céréale) en regardant les vieux du village danser, chanter et jouer de la musique. On a vite réalisé qu'on avait mal estimé nos besoins en eau...Il faisait tellement chaud qu'on buvait sans arrêt. On était un peu découragé car on avait soif, on était sale, les latrines étaient dégueulasses et la voiture ne partait pas. Eve, Simon et les enfants devaient partir le lendemain pour retourner à Bobo. Le lundi matin, après plusieurs heures d'attente (c'est l'Afrique!), la voiture a finalement été remorquée jusqu'au village le plus proche où le problème a été réglé.

Après le départ de la famille Cloutier-Lavigne, j'ai passé l'avant-midi avec Maimouna, la femme de Mabourou. Il y avait le rite funéraire où tous les beaux-frères du défunt remettent des chèvres au chef de famille. En tout, 40 chèvres ont été données! Ensuite, elle est allée changer de tenue et nous sommes allées visiter sa famille et boire du dolo. Elle est encore retournée se changer et nous sommes allées visiter une autre famille. Je crois qu'elle a porté 5 tenues différente cette journée-là! Je suis ensuite allée au marché de Bomborokuy avec Mabourou pour m'approvisionner en eau. Mais avant d'y aller, on a dû arrêter 10 fois en chemin pour des salutations. Encore! J'étais tannée de toujours arrêter, descendre, baisser ma jupe, dire bonjour, faire des sourires car je ne comprenais absolument rien de ce qu'on me disait, remonter ma jupe, embarquer sur la moto. J'avais chaud, j'avais soif, j'avais faim, j'me retenais pour pas aller aux toilettes. Ca me tentait juste d'aller du point A au point B. C'est tout. En plus, les burkinabés aiment bien l'impératif. C'est pas méchant mais c'est juste agaçant à l'oreille. Descends. Viens avec moi. Je demande 100 francs. Bois. Mange. Mais ceux qui me connaissent bien savent que je ne m'en laisse pas imposer. Je suis capable de remettre les points sur les « i ». Ouf! J'me sentais un peu irritable. Je regrettais quasiment de ne pas être partie avec Eve et Simon. J'ai passé l'après-midi avec la soeur de Mabourou. On a dansé, dansé, dansé. On dansait en cercle et tout le monde dansait pareil. Les pas étaient pas trop compliqués. J'étais capable de suivre assez bien. Parfois, on venait me saluer en criant et en se penchant à mes pieds et je devais me pencher sur le sol à mon tour. Vers 18h30, on s'est rendu compte que ca faisait longtemps qu'on avait pas vu Ida, la fille de Mabourou et Maimouna. Au Burkina, les enfants appartiennent au village. Tout le monde s'occuppe d'eux. Tout le monde connait qui est l'enfant de qui. Mais il faisait très noir et il commencait à venter très fort et personne ne l'avait vu. Ils l'ont chercher partout pour se rendre compte qu'elle était chez les soeurs de Mabourou. Tout un soulagement! Le soir, on est retourné danser après avoir mangé du riz à la main. (C'est tellement plus simple et moins chaud avec une cuillère!?!) Lorsque je suis revenue dans la cour familiale, tout le monde était couché, tout habillé, sur des nattes directement sur le sol. Ils étaient presque empilés les uns sur les autres. Il y en avait partout! Je me suis trouvé un coin et j'ai dormi jusqu'à temps que j'entende les femmes laver les marmites de la veille, tamiser la farine, préparer le tô. Le soleil n'était même pas encore levé! Mabourou est ensuite venu me reconduire à la gare d'autobus où je suis arrivée à 8h00 alors que l'autobus est partie à 8h05...48 heures au village, c'est assez pour réaliser l'importance de l'eau, (surtout l'eau froide!) la nourriture, l'électricité, les toilettes propres. Maudit qu'on est donc chanceux d'avoir tout ça sans même sans soucier! En bref, j'ai bien aime l'experience mais je suis bien contente d'etre de retour a Ouaga!






17 avril 2010

Expressions burkinabés

Comment ça va chez vous?
Un peu, un peu.


Oups! Ca veut dire qu'il y a un problème. Difficile de répondre « ça va bien » quand on ne mange pas assez, qu'on a pas d'argent, pas de travail malgré nos diplômes, que les affaires vont mal ou pire encore, quand on a pas la santé. Je me sens toujours impuissante car de mon côté, ça va toujours très bien.

Bonne Arrivée!

Chaque fois qu'on arrive au travail, au marché, au maquis, on nous souhaite la bienvenue de cette façon. On l'entend donc plusieurs fois par jour, à moins de ne pas sortir de sa cour.

Ca fait deux jours!


Peu importe si cela fait 2 jours, 2 semaines ou 2 mois, ça veut dire : ça fait longtemps qu' on ne s'est pas vu! Au début, j'avais tendance à préciser le nombre de journée: ça fait pas 2 jours, ça fait 5 jours mais maintenant, j'ai saisi le sens de l'expression.

Il est parti.
Ne demandez pas il est parti où? Il est décédé.

Je vais demander la route
Pas besoin d'expliquer le chemin du retour. Notre visiteur nous informe qu'il va bientôt nous quitter. Il faut alors aller le reconduire à la porte.

C'est gâté
C'est brisé, cassé.

Même père, même mère?
Quand on me dit: « je vais aller voir mon frère », je demande parfois Même père, même mère? pour savoir si c'est un vrai frère ou un ami.

Quoi, quoi, quoi
- S'utilise dans le milieu d'une phrase ou après une énumération pour dire etc.
- Quand un client arrive dans la petite fenêtre du dépôt pharmaceutique et que nous sommes un peu plus loin, on entend « quoi, quoi ». Ca remplace un peu la sonnette pour avertir qu'il y a quelqu'un. Personnellement, c'est un son qui m'agresse un peu.

Ou bien
Cette expression complète ou remplace l'utilisation du point d'interrogation dans une discussion. Tu viens avec moi, ou bien?

Sachets
Petits sacs en plastique noir qu'on retrouve partout pour transporter nos achats. Malheureusement, ils terminent souvent leur vie dans la rue ou les dépôtoirs et font beaucoup de pollution visuelle. Le rammassage des déchets n'est vraiment pas la priorité du pays. C'est un peu traumatisant de constater toute cette pollution visuelle.

Go choco
Une fille qui aime bien « faire le show » (faire la fête).

Y el kabé
Y'a pas de problème. Même s'il y a un problème, on dit qu'il n'y en a pas. On ne veut pas le voir et pas le savoir. Et quand il y a vraiment un gros problème? On ne dit plus rien.

14 avril 2010

faits divers

Mardi matin, mon quartier était désert. Mes vendeuses de mangues, d'arachides, de zom-kom et de dègué n'étaient pas là et la boutique au coin de ma rue où tout le monde prend du pain et un Nescafé était fermée. J'ai vite appris qu'une voisine était partie (= décédée) lors d'un accouchement. Elle ne s'est pas rendu à l'hôpital à temps pour une césarienne et elle laisse dans le deuil ses 3 jeunes enfants. C'est très triste tout cela. Il y a beaucoup de mortalité maternelle et infantile ici. Autrefois et peut-être encore aujourd'hui dans certains villages, pour mériter son titre de femme, il fallait accoucher dans la maison de sa mère et ce, sans un cri! Alors imaginez devoir aller accoucher à l'hôpital ou encore pire, crier de douleur à l'hôpital! C'était une honte! Les femmes restent environ 6h à l'hôpital et elles retournent chez elle. On parle maintenant de planification familiale pour inciter les familles à avoir moins d'enfants (en moyenne 2 ou selon les moyens financiers) mais de mieux les éduquer, les soigner, les nourrir. Le père de mon ami me racontait qu'avant, il y avait tellement de décès à cause de la rougeole et la rubéole qu'on avait plus d'enfants pour être sûr d'en voir quelques uns devenir adulte...

On m'avait prévenu que le mois d'avril serait chaud, très chaud. Ces temps-ci, il fait 45'C le jour et 35'C la nuit. C'est très inconfortable pour dormir. Pars le ventilateur ou l'air climatisé, me direz-vou,s mais il y a aussi des coupures d'électricité le jour et toute la soirée jusqu'à minuit! Pas d'autres choix qu'endurer! Je fais rien et j'ai des grosses goutelettes de sueur qui me coulent sur le corps. On dirait constamment que je sors de la douche. Je bois, je bois, je bois mais il fait chaud pareil!

J'ai rencontré un délégué médical (= représentant pharmaceutique) cette semaine. Je suis frustrée à chaque fois! Ils connaissent tellement pas leurs produits et font croire toutes sortes de choses aux infirmières! J'ai appris que l'amoxicilline et la cloxacilline sont interchangeables car ils appartiennent à la classe des pénicillines, que le DEET 50% est sécuritaire, que les médicaments génériques sont souvent sous-dosés et moins efficaces que les spécialités, que les recommandations de l'OMS sur le paludisme sont biaisées. Bref, il manque beaucoup de rigueur scientifique ici. Tout le monde prescrit un peu ce qu'il veut selon sa propre expérience. C'est difficile pour un coeur de pharmacienne!

J'ai défait ma tête la semaine dernière, c'est-à-dire que je n'ai plus de tresses. Je n'ai presque plus de cheveux non plus! Quand j'ai pris ma douche, ils sont presque tous tombés. C'était très traumatisant!Ils me restaient dans les mains par grosse poignée! Et maintenant, mes cheveux sont tout minces, fragiles, cassés, grichou. Je vais y repenser à deux fois avant de me faire retresser!

Thérèse et Pierre sont repartis au Canada. C'est dommage car je m'entendais très bien avec eux et ils n'avaient pas de conflits avec personne. Ils vont beaucoup me manquer. Le mandat de Thérèse était seulement pour 3 mois. Quand j'y pense, ça a passé très vite mais quand je pense à ma propre expérience, j'ai l'impression que ça fait au moins 6-12 mois que je suis ici. C'est drôle comment la notion du temps est différente dépendemment des perpectives.

7 avril 2010

Grosse semaine de travail!

Cette semaine, j'ai « travaillé » seulement 3 jours à cause du congé de Pâques. Travailler est un bien grand mot. J'ai plutôt eu l'impression d'observer le temps passer. Je me suis sentie complètement inutile.

Je me suis même demandé à quel point les organismes à vocation humanitaire rendent service à la population africaine. On contribue à enrichir les riches (présidents des associations, ministres, etc) sans changer la qualité de vie des pauvres. Dès qu'il y a un problème, les blancs débarquent pour tout régler. On construit, on bâtit, on invente, on change et on repart. Les burkinabés ont perdu leur sens de l'initiative et leur motivation du même coup. Je m'en rends bien compte au travail et c'est difficile de faire avancer les choses. Si les burkinabés étaient livrés à eux-mêmes, sans l'influence des blancs, peut-être réussiraient-ils à identifier les problèmes et à trouver les solutions? Bien sûr, la notion de développement est en changement. On parle maintenant de transfert de connaissance et de renforcement des capacités plutôt que de prestation de service. Il faut leur apprendre à pêcher plutôt que de pêcher à leur place. C'est tout un défi à relever!

Les burkinabés, m'a-t-on dit, étaient plus heureux il y a quelques décennies. Les valeurs morales et familiales étaient plus importantes que les valeurs matérielles. On pouvait être heureux même sans argent car les villageois partageaient tout. Il suffisait d'avoir une bonne réputation pour mériter le respect de ses voisins. (les voleurs et les voyous étaient vite mis de côté) Avec la modernité, les burkinabés ont acquis des valeurs occidentales/européennes et sont devenus un peu plus indépendants et axés sur l'argent. Heureusement, je juge que ce n'est pas généralisé car j'ai souvent des exemples de générosité incroyable où des amis qui n'ont pas beaucoup d'argent donnent le fond de leurs poches à des mendiants ou d'autres qui prennent en charge les études de jeunes orphelins pour les aider.

Sur ces réflexions, bonne semaine!

Banfora

J'ai passé une très belle semaine. J'ai commencé à aller courir chaque soir après le travail vers 18h. Au début, c'était pénible et je faisais toujours du stop and go mais mardi, quand les enfants se sont joints à moi, ça allait beaucoup mieux. A chaque jour, il y avait de plus en plus d'enfants du quartier qui m'acconpagnaient et l'activité durait de plus en plus longtemps. Vendredi, ils étaient environ 40!!! J'ai désigné un chef qui décidait comment on courait. On a couru avec un doigt dans l'oreille, en faisant l'oiseau, en touchant notre tête et notre ventre en alternance, talons-fesses, marche militaire, etc...C'était bien drôle! La prochaine fois, je prendrai une photo de mon club sportif! Je vais essayer d'y aller chaque jour! Ensuite, je mangeais un peu, je prenais ma douche et j'avais de la visite. C'était ma petite routine de la semaine.

J'ai passé la fin de semaine de Pâques à Banfora avec Thérèse, Pierre et Michelle. On est parti samedi en autobus à 9h00 et on est arrivé vers 17h. C'était une longue journée de route. Dimanche, nous avons fait une balade en moto/vélo dans les champs de canne à sucre et les forêts de manguiers pour visiter les dômes de Fabedougou. C'était très impressionnant comme paysage. Nous avons ensuite marché jusqu'aux cascades de Banfora. La baignade fut très appréciée car il faisait particulièrement chaud cette journée-là. L'eau était à la température parfaite! Ni froide, ni chaude. J'aurais pu facilement rester là toute la journée. Dans l'après-midi, Michelle et moi sommes allées au lac Tangrela, réputé pour ses hipoppotames. Nous avons fait une promenade en pirogue jusqu'à une famille de 10 hippo qui se rafraichissaient. Nous sommes restés environ 1 heure et ils n'ont pas beaucoup bougé mais nous avons pu constaté à quel point c'est un animal énorme. Des enfants se baignaient aux abords du lac et ils ne semblaient pas avoir peur du tout. Dimanche, je voulais aller visiter l'usine de canne à sucre mais après avoir fait 45 min de mobylette pas trop confortable avec le guide, on nous a dit que depuis 1 mois, ca prenait des autorisations à l'avance pour visiter. (il me semble que le guide aurait dû le savoir, mais bon) Je suis donc retournée à l'hôtel et nous avons décidé de partir plus tôt pour Bobo. On a pu passer la soirée avec les autres coopérants et Helen, une nouvelle coopérante de Grande-Bretagne. C'était un beau weekend.




Ramatou est venue me chercher au terminus d'autobus. Elle m'a ensuite aidée à passer le balai, la serpillère, arroser les arbres,etc. Elle est trop gentille! Nous sommes ensuite allée à la boutique Karilor, où l'on vend les produits à base de beurre de karité. Ca faisait longtemps que je voulais en acheter pour tester ses bienfaits. Il paraît que la qualité du karité au Burkina est supérieure à bien d'autres pays africains. J'ai acheté du lait corporel à base de lait de karité et de cacao et du beurre de karité à 80%. C'est gras comme la vaseline. Les burkinabés l'utilisent surtout chez les bébés et quand il fait froid (oui!oui! Ca arrive en décembre!) pour hydrater la peau parce qu'autrement, la poussière te colle sur le corps. Certaines personnes n'aiment pas le beurre de karité car ça noircirait la peau...(j'ai pas trop compris ce qu'ils voulaient dire) Je pourrai vous donner mon opinion après quelques mois d'essai.

J'ai entendu dire que le crabe était arrivé! Mangez-en beaucoup pour moi! Avec du beurre citronné!